Delphine Devraine, IDE - Corinne Chaigneau, Assistante Sociale - Dr. Nigar Ribault, PH - Dr. Alain Gasté, PH
Introduction
Continuité de notre travail :
- Féminisation des équipes
- Equipe pluridisciplinaire
- Le Conseil Local de Santé Mentale
- Trajectoire de soins du patient
Nous venons aujourd’hui réfléchir au Réseau
(Pensez-vous faire du Réseau ?)
De l’Équipe au Partenariat
- Premier niveau de structuration de l’équipe dans le personnel de l’établissement, qui partage le même projet d’Etablissement
- Au sein de ce personnel, l’équipe unique se constitue à l’échelle d’un service ou du secteur, sous l’autorité du Chef de secteur, qui partage une culture commune et élabore en commun une politique de soins dans son projet de service. Cette équipe est pluridisciplinaire. Elle est précurseur du Réseau mais elle est encore un reliquat du vieil asile puisqu’elle n’étend pas encore son partenariat à la ville.
- La Loi du 30 juin 1975, dite loi d’orientation en faveur des Personnes Handicapées, propose une articulation du sanitaire et du social et introduit une notion de prise en charge globale du patient qui fait appel à un partenariat.
- Le Partenariat se formalise, dans le cadre de la Politique de Santé Mentale, proposée par l’Etat pour résoudre de nouvelles difficultés organisationnelles et de moyens, liées, entre autres, au nombre devenu très faible des professionnels en Psychiatrie (diminution du nombre de psychiatres, fin du diplôme ISP et IDE pas assez nombreux) et à la saturation des lits d’hospitalisation.
La Loi du 11 février 2005 dite Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées vient rénover l’idée du partenariat proposée 30 ans plus tôt par la Loi de 1975. La démarche est institutionnalisée entre les communes locales, les services de soins de proximité, les associations de patients et de familles. Elle s’inscrit dans un véritable dispositif, à travers la mise en place des Maisons du Handicap, d’une Commission des Droits et de l’Autonomie, des équipes d’intervention pluridisciplinaires. L’objectif visé est d’accompagner les personnes handicapées et leur famille dans la définition et la mise en œuvre de leur projet de vie individualisé. La démarche peut être portée par le Projet d’Etablissement : Exemple du Conseil Local de Santé Mentale.
- La réflexion porte sur la place du patient dans la société. Aux structures de soin dans la ville se sont rajoutés des « centres socio-thérapeutiques » qui accueillent les malades comme membres et aménagent pour eux un espace convivial de rencontre, d’entraide, d’ouverture culturelle (OSE). Ces centres deviennent en 2005 les Groupes d’Entraide Mutuelle (GEM).
Du Partenariat au Réseau
La fin de la sectorisation est annoncée par :
- le Rapport d’étape de la mission Cléry-Melin avec les notions de territoire de santé où il s’agit d’organiser la permanence territoriale des soins avec :
- une commission territoriale de psychiatrie et de santé mentale, chargée d’élaborer un projet médical de territoire, associant les acteurs privés et publics, et dotée d’un Psychiatre coordinateur chargé d’évaluer les besoins en soins, de conseiller et d’orienter les différents intervenants.
- Un CMP ressource territorial (CMP-RT) pivot du territoire de santé dont la mission est de mettre en place un Réseau de santé en lien avec les CMP, le dispositif libéral et privé, l’hôpital général, les associations, les services sociaux et les familles.
- Le développement des alternatives à l’hospitalisation : création des unités intersectorielles d’accueil (UHCD), les unités de soins de réadaptation intersectorielles (USRI), les unités de suite, la réorganisation de l’Urgence avec le centre 15, le développement des services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) et médico-sociaux (SAMS)
- le Plan Hôpital 2007 avec :
- La généralisation de la tarification à l’activité
- Le Schéma Régional d’Organisation Sanitaire : le SROS devient l’outil central de la régulation de l’offre de soins. C’est dans une annexe du SROS que figure la répartition quantitative des activités et des équipements par bassin de santé, répartition arrêtée par l’ARH.
- La fragmentation en pôles d’activités
- Le renforcement du Conseil d’Administration notamment en matière d’organisation, contractualisation et nomination de certains responsables hospitaliers.
- Le Plan de Santé Mentale 2005 – 2008 : « Mieux accueillir et mieux soigner »
- La notion de Médecin Traitant, coordonnateur des soins avec les professionnels spécialisés,
- le développement du travail en Réseau avec la participation de tous les partenaires impliqués : le Secteur Psychiatrique, les Médecins Généralistes et Spécialistes, les professionnels du champ social, les représentants des usagers et des familles, les professionnels de l’Education Nationale, la Justice et les institutions du champ sanitaire
- le renforcement de la formation médicale initiale et continue, avec la mise en place des EPP
- l’élaboration et diffusion des guides du bon usage des soins et recommandations de bonnes pratiques par la HAS.
Du Réseau
Etymologie
D’un point de vue étymologique, le terme de réseau vient du latin « rete » et veut dire filet, ou de « retis » qui se traduit par « ouvrage formé par un entrelacement de fils ».
L’adjectif réticulé qui en découle caractérise les objets ayant une structure de filet. Ces définitions nous renvoient à de nombreuses utilisations du terme de réseau dans des domaines divers : domaines techniques tel que les télécommunications, les chemins de fer, les configurations anatomiques d’entrelacs de vaisseaux et surtout les circuits neuronaux du système nerveux central qui se structure en réseau. Il peut aussi qualifier d’un point de vue « sociologique », un ensemble de personnes ou d’organismes qui sont en relation pour agir ensemble dans un même but. Sur un plan négatif, voire même occulte, ceci nous rappelle l’organisation en réseau de la mafia, alors que d’une manière plus positive, le réseau est l’exemple de la Résistance qui luttait « cachée », contre le pouvoir en place.
Le succès actuel du terme de réseau rend sans doute compte de la complexité du champ collectif traversé en tout sens par de multiples interconnexions : sociales, économiques, politiques et techniques.
« Complexité », aussi car le réseau n’est pas qu’une notion, il devient une cybernétique (c’est à dire : l’ensemble des théories de l’information relatives aux communications et à la régulation dans les systèmes dont l’activité est orienté vers une finalité=projet) et développe donc une « philosophie » lui appartenant et qui se veut novatrice.
Qu’est-ce qu’un Réseau de soins ?
Un Réseau de soins, c’est d’abord la collaboration sur la base du volontariat, dans une zone géographique donnée, de professionnels de santé de disciplines différentes : médecins généralistes, médecins spécialistes, pharmaciens, infirmiers, kinésithérapeutes, mais aussi psychologues et travailleurs sociaux.
Le patient est au centre du dispositif : les professionnels se concentrent sur la prise en charge de patients souffrant d’une pathologie ou victimes d’un problème médico-social spécifique ou encore se coordonnent pour une prise en charge globale (toutes pathologies confondues) de leurs patients, axée sur la prévention. Les pathologies sont le plus souvent des pathologies chroniques (asthme, diabète, hypertension artérielle, dépression…) ou lourdes (VIH, VHC, cancers). Beaucoup de Réseaux s’organisent aussi autour de la prévention et de la prise en charge de l’alcoolisme, de la toxicomanie ou de l’aide à des populations en difficulté.
A quoi sert un Réseau de soins ?
L’objectif d’un Réseau est d’améliorer la prise en charge d’une pathologie ou d’un type de populations précis : son fondement est la coordination (le coordonnateur est désigné ou une cellule de coordination) des professionnels qui s’engagent à assurer la continuité des soins et à améliorer leur qualité, avec des protocoles définis en commun, tout en mesurant les coûts engendrés. Ceci se traduit par exemple par une économie de temps et un gain d’efficacité dus au fait que les examens nécessaires sont effectués une fois mais pas deux et que les médecins impliqués dans la prise en charge du patient ont échangé toutes les informations nécessaires. L’objectif d’un Réseau est aussi d’attirer des patients mal ou non soignés dans un système où ils sont mieux "cadrés" et où ils ont moins de démarches difficiles à mener tout seuls.
Comment sont nés les Réseaux de soins ?
Le développement des Réseaux de soins s’est appuyé sur l’apparition de groupes de populations particulièrement en difficulté, pour lesquels le système de prise en charge existant était inadéquat. Le vieillissement de la population et les nouveaux problèmes de santé publique se sont en effet heurtés à la stricte séparation des responsabilités entre le sanitaire et le social d’une part et d’autre part au cloisonnement existant entre prise en charge en ville et prise en charge à l’hôpital. Ainsi les premiers Réseaux sont nés autour de la prise en charge des personnes âgées, dépendantes et le maintien à domicile. L’accès aux soins des plus démunis ou des personnes en situation de précarité est un deuxième thème de réflexion depuis les années 80. Le SIDA au début des années 90 a donné une impulsion aux Réseaux VIH ville-hôpital, institutionnalisés par une circulaire du ministère de la santé. Des problèmes comme la toxicomanie, la santé des jeunes ont été par la suite au cœur des préoccupations. Ainsi différentes circulaires ont préconisé la coopération des structures et des professionnels pour ce type de problème. Au milieu des années 90, le bilan des initiatives a donné les conclusions suivantes : les Réseaux souffraient de l’absence de cadre réglementaire et de manque de moyens.
Plus de 20 textes évoquent le sujet depuis 1991. Les ordonnances Juppé du 24 avril 96 donnent une première assise réglementaire aux filières de soins et aux Réseaux. La loi du 4 mars 2002 donne une définition réglementaire et unique du Réseau :
« les Réseaux de santé ont pour objet de favoriser l’accès au soins, la coordination, la continuité ou l’interdisciplinarité des prises en charge sanitaires, notamment de celles qui sont spécifiques à certaines populations, pathologies ou activités sanitaires. Ils assurent une prise en charge adaptée aux besoins de la personne tant sur le plan de l’éducation à la santé, de la prévention, du diagnostic que des soins. Ils peuvent participer à des actions de santé publique. Ils procèdent à des actions d’évaluation afin de garantir la qualité de leur services et prestations. »
« ils sont constitués entre les professionnels de santé libéraux, les médecins du travail, des établissements de santé, des centres de santé, des institutions sociales ou médico-sociales et des organisations à vocation sanitaire ou sociale, ainsi qu’avec des représentants des usagers »
Qu’est-ce qui caractérise un Réseau de soins ?
Un Réseau repose sur 4 dimensions :
- le projet médical qui lie les professionnels
- la coordination des soins grâce à une plus grande interaction des professionnels
- la formation et l’information des professionnels (apprentissage de la pratique en réseau, respect des référentiels, retour d’information sur les résultats du Réseau)
- L’évaluation (évaluation de la pratique en réseau, de la qualité des soins et évaluation économique du Réseau.
Spécificité du Réseau de soins
Un des éléments moteurs du Réseau est l’appartenance des professionnels qui y adhèrent à des milieux différents et à des zones d’influence différentes (équipe « interdisciplinaire »). Un Réseau de soins est à cet égard différent des réseaux informels d’adressage des patients tels qu’ils existent aujourd’hui dans l’exercice médical (tel médecin a l’habitude d’adresser ses patients à tel confrère et attend en retour la même chose de ce dernier).
Les professionnels du Réseau définissent ensemble un projet médical (protocole de soins et objectifs à atteindre). Ils s’engagent à assumer des tâches bien définies et à se coordonner pour mener à bien ce projet. Le généraliste qui suit le patient est en relation directe avec le médecin hospitalier qui l’a soigné et qui lui délivre son traitement : ils partagent et échangent des informations à jour sur leur patient. Les conseils d’observance et l’information ciblée sont définis en commun et diffusées par les acteurs, notamment paramédicaux. Le système d’information permet de faciliter ces échanges et de constituer un dossier médical commun aux intervenants, destiné à suivre le patient dans le Réseau. D’autre part, les soins prodigués dans le cadre d’un Réseau peuvent justifier un financement différent du schéma classique de la sécurité sociale. Enfin, le Réseau implique la définition et la mise en place d’une évaluation : le système d’information doit permettre de recueillir les données médicales et économiques nécessaires à cette évaluation.
Comment se crée un Réseau ?
Le Réseau naît d’un constat : population en difficulté sur un territoire donné, problème de santé publique pour lequel les moyens existants pourraient être utilisés de manière plus efficace.
Il s’organise ensuite autour d’un responsable motivé : tout Réseau doit avoir un leader, qui puisse soutenir la longue phase de mise en place du Réseau. La raison d’être du Réseau est le projet médical (par exemple, l’amélioration de l’auto surveillance glycémique dans un Réseau diabète, celle de l’observance dans le cas de l’asthme). Celui-ci fait l’objet d’un consensus des professionnels, souvent implicite au départ, et qui se formalise par des rencontres, des concertations, voire la création d’associations ou autres groupements d’intérêt commun : c’est le point de départ pour définir les objectifs du Réseau et les moyens d’action.
Ceci est ensuite formalisé dans des chartes de qualité qui engagent les professionnels adhérents et les futurs patients du Réseau et s’appuie sur des protocoles de prise en charge écrits.
Une convention ou un protocole d’accord est enfin signé lorsque le Réseau implique de multiples partenaires dont des personnes morales. La recherche et l’obtention de financement constituent en général l’ultime étape avant le fonctionnement effectif du Réseau. L’implication et la motivation des professionnels sont alors essentielles pour que des patients soient de manière concrète "pris en charge" par le Réseau.
Cadre juridique et financement.
Deux principaux financements de Réseaux existent à ce jour :la D.R.D.R (Dotation Régionale de Développement des Réseaux qui est la 5ème enveloppe de l’Objectif National des Dépenses de l’Assurance Maladie) et le F.A.Q.S.V (Fonds d’Aide à la Qualité des Soins de Ville). Ces financements peuvent être complétés par l’intervention d’autres financeurs tels que les collectivités territoriales, des fondations etc…(plan de financement pour 3 ans).
Le Réseau est doté d’un statut juridique qui relève soit de groupement de coopération sanitaire (G.C.S.), de groupement d’intérêt économique (G.I.E.), de groupement d’intérêt public (G.I.P.) ou d’association, ceci afin de pouvoir recevoir des fonds et assurer sa propre gestion.
L’évaluation du Réseau
L'évaluation est au cœur de la démarche et fait part d’un processus de gestion de la qualité du Réseau. Après avoir identifié les objectifs du Réseau, il est nécessaire de mettre en place un certain nombre d'outils indicateurs permettrant d'évaluer les performances du Réseau au niveau médical, économique, sanitaire et/ou social (satisfaction des usagers et des acteurs).
L’évaluation doit répondre à six questions :
- Le Réseau atteint-il ses objectifs ?
- Quelle est la qualité des processus mis en œuvre et des résultats atteints ?
- Les personnes prises en charge sont-elles satisfaites ?
- Quel est l’apport spécifique de l’organisation en Réseau dans le degré d’atteinte des objectifs, la qualité des processus et des résultats ? Quels sont les coûts engendrés par le Réseau ?
- Quels sont les effets indirects, positifs et négatifs, induits par le Réseau ?
Pour répondre à ces questions, trois phases sont nécessaires : documenter chaque question, mesurer les résultats, construire des indicateurs et évaluer leur pertinence.
L'ANAES, qui est la structure compétente pour mettre en œuvre la procédure d’accréditation (voir son rapport sur : les principes d’évaluation des Réseaux de santé), recommande la constitution d'un comité de pilotage de l'évaluation qui connaît bien la réalité du Réseau étudié et de ses acteurs (tout en étant indépendant).
Quid du Réseau en Psychiatrie?
Le modèle Hardy-Baylé
(Alors, pensez-vous toujours faire du Réseau ?...)
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Delphine DEVRAINE, IDE
Corinne CHAIGNEAU, Assistante Sociale
Dr. Nigar RIBAULT, PH
Dr. Alain GASTÉ, PH
Service du Dr. Vignat
C.H. Saint-Jean-de-Dieu
290, route de Vienne
69373 Lyon cédex 08
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