- Compte-rendus
PSYCHIATRIE ET PRECARITE

Mme GLATZ : AGAPES est une entreprise d’insertion et de réinsertion dans la société. Il est, par exemple, nécessaire de se réadapter aux horaires de travail.
C’est l’idée de BONNAFE des soins dans la cité.
On travaille avec un réseau, des appartements. On a une subvention de la DASS. Il s’agit d’un travail de restauration, de « buffets »
Eventuellement les services viennent pallier aux manques.
L’entreprise demeure précaire ; on a moins de subventions qu’avant. La rentabilité est de plus en plus présente.

Dr PANNETIER : L’attente des services sociaux vis-à-vis de la psychiatrie est importante.
En fait, chaque secteur a sa position.
On a organisé des réunions services d’insertions et services de psychiatrie pour qu’ils se connaissent. Il y a le réseau ville-hôpital.
Il y a la précarité versus ville/versus campagne. Les CHRS sont en centre ville, ils sont « hors secteur » Les « SDF » deviennent des « sans hôpital fixe » Il y a une difficulté pour que la psychiatrie ait un discours commun.
Un tiers au moins des précaires sont des borders-line et il y a en plus le problème des addictions : en fait ils sont en danger de mort dans la rue. Les durées de vie dans la rue sont effrayantes. Il y a une vraie difficulté pour accéder aux soins.
Les « morts sociaux » ne préviennent pas.
Ils ne s’expriment plus, ils cessent d’être parmi les hommes.
On dit que ce n’est pas de la psychiatrie, mais certains sont très connus des services de psychiatrie.
L’exclusion, c’est être « fermé dehors »  
Beaucoup de malades psychiatriques commencent dans la rue, exclus par leurs familles et avec une toxicomanie.
On voit beaucoup d’héboïdophrénes. Il faut faire la différence entre la position toxicomaniaque, la position psychopathique, la position psychotique. Il y a aussi beaucoup de dépersonnalisation. De toutes façons, la psychiatrie pose le diagnostic relativement tard.
On travaille avec la « veille sociale » Il y une liste d’environ 150 personnes. On voit qu’il faut 2à 3 ans pour régler les dossiers. Certains ne viennent jamais aux urgences psychiatriques. On a un projet d’équipe mobile, en fait l’équipe sociale qui peut faire appel à l’équipe psychiatrique, sortir dans la rue depuis les urgences, faire des « maraudes »
Après, l’équipe des urgences en liaison avec la précarité ré-adresse aux équipes de secteur.
Mme HOCHARD : j’interviens quand l’équipe sociale repère quelqu’un en situation « difficile » dans la rue. J’accompagne l’équipe qui le rencontre au quotidien pour faire une évaluation. C’est toujours un travail dans l’urgence. Les pompiers ne transportent que les personnes consentantes. Il faut donc qu’il ait un problème de santé. On peut aussi intervenir dans un centre. De toutes façons, ce qui est important c’est les liens qu’on peut établir avec les équipes. Comme ça les pompiers peuvent dire « je vois quelqu’un de la rue de dépressif. Je le mène aux urgences » ou «  celui là il est il trop alcoolisé. Ca n’ira pas aux urgences »

Dr BOUDET : on est à la limite de l’organisation intersectorielle. En fait, on n’est pas adapté. Les modèles de répartition servent à passer d’un secteur à l’autre. A la FERUP en 2001, le Dr HORASSIUS disait que la Psychiatrie Française suivait les psychotiques ; EMMANUELI a répondu qu’un tiers des gens dans la rue sont des psychotiques ! 

Dr CHARDIN : ce sont des personnes souvent hospitalisées et après rien. Pour combien de personnes aboutit-on à une prise en charge ? Et si on insiste on aboutit à un contrôle social.

Mme AURIAC-LAMARY : il y a souvent des problèmes avec les personnes désocialisées qui n’ont pas d’adresse et qui sont en attente d’uneAAH par exemple. Quelle autre solution qu’une hospitalisation ?
On travaille différemment avec les gens en situation de précarité quand il y a des solutions d’hébergement.

Dr PANNETIER : (si on prend la normalisation sociale prenons par exemple ) la confidentialité : qu’est ce qui fait secret ? C’est la confidence, c’est de dire des choses de son intimité. Le paradoxe c’est que dans la rue on est exposé à tous !

Dr CHARDIN : il y a le problème de la difficulté à inscrire ces patients dans le secteur. C’est la notion de « patate chaude »

Mme GLATZ : pour que les patients viennent à AGAPES ils doivent avoir une prise en charge de CMP. Après il y a des problèmes de durée quand les 7 places sont occupées. Ce sont des emplois précaires de 20 heures et les patients sont souvent dans un appartement associatif. Il y a toujours le problème des subventions.

Dr PANNETIER : les travailleurs sociaux sont toujours dans une extrême précarité. Ils sont à la « chasse aux subventions ». En plus, actuellement, il y a un passage subventions d’état /subventions du Conseil Général. Maintenant les associations font le travail du service public.

Dr PANNETIER : il y a une « clinique de la rue »
Après quelques années dans la rue, la psychose ne se présente plus de la même façon car s’y ajoute les addictions, l’alcool en particulier.
On ne voit plus grand-chose en fait et il devient difficile de reconstituer le trajet de vie de la personne.
Souvent il y de la revendication, des traits paranoïaques.
Avec un neuroleptique retard ça va mieux.
Et puis il y a le psychotraumatisme : à un moment, il y a eu rupture, ils sont « tombés » dans la rue. Il faut 3 jours pour se « clochardiser », 3 ans pour s’en sortir.
Il y une déréalisation, une dépersonnalisation qui est renforcée par l’alcool. On a une confusion mentale, des problèmes de repère temporel.

Dr CHARDIN : il y les SDF qui voyagent ; dans le Sud on voit arriver des SDF qui viennent du Nord.
Et puis il y a la question de l’héboïdophrénie. Un patient vu à jeun, le matin, aux urgences, le soir, peut tout casser au foyer et agresser son voisin.
Il y a aussi la question économique. On dit que la mendicité dans une « bonne place » peut rapporter 30 € par jour.

Dr DELORENZI : sur le plan psychopathologique la rue c’est la « maison ouverte » On peut se demander si des syndromes de dépersonnalisation ne sont pas des mécanismes de défense contre la vie dans la rue.

 

Rapporteur :

Dr Jean-Paul BOYER
CHI de FREJUS SAINT-RAPHAEL

 
Carry-Le-Rouet 2008 : Programme et textes