Hébergements thérapeutiques

Mardi, 01 Mai 2001 01:00 Robert BERTHELIER
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L’expression, me semble-t-il, pose question. On voit bien ce que signifie le vocable « hébergement » (un lieu où on vit, on loge, qu’on habite) mais qu’en est-il du «  thérapeutique » ? quelle(s) relation(s) peut-il bien exister entre un espace de vie et le soin ?

I. LES ALTERNATIVES A L’HOSPITALISATION

A. PLACEMENTS FAMILIAUX SPECIALISES (P.F.S.).

Cette pratique a longtemps été réservée aux enfants, pour qui elle représente un substitut (ou une alternative) à l’hospitalisation à temps plein (dans notre département, elle a représenté une politique volontariste, initiée entre autres par Tony LAINE, qui a permis la suppression des lits de pédo-psychiatrie). Elle a été étendue aux adultes et , actuellement, 87 places sont budgétisées pour eux par notre établissement (à noter que, historiquement parlant, il a existé jusqu’à 140 places : leur budgétisation n’a toutefois pas pu être maintenue en raison d’une très forte augmentation des charges sociales qui devait être compensée par l’état, ce qui n’a pas eu lieu. Ex. pour mon secteur : 13 places théoriques, 8 effectivement financées).

Dans les faits, 1 ou 2 patients sont placés dans une famille d’accueil dont l’un des membres devient officiellement salarié de l’établissement hospitalier. Des conditions précises concernant l’hébergement (hygiène, confort…) sont exigées.

Indications : généralement des patients chronicisés, assez régressés, non autonomes mais pouvant vivre en dehors du milieu hospitalier sous réserve d’un accompagnement permanent. Chaque secteur dispose d’un nombre de places variables.

Un double suivi est mis en place :

Le but visé est en principe une évolution du sujet lui permettant, à terme, de devenir plus autonome et d’intégrer une autre structure. Dans les faits, ce projet évolutif s’avère assez souvent illusoire et l’expérience montre que bon nombre de P.F.S. deviennent en réalité des lieux de vie permanents.

Problème : le P.F.S. est considéré, administrativement parlant, comme un simple substitut de l’hospitalisation, équivalent d’une hospitalisation à temps plein (paiement du forfait hospitalier) et faisant partie des institutions intra-hospiralières, ce qui en fait une structure lourde.

 

B. FOYERS DE POST-CURE.

Ce sont probablement les structures les plus anciennes et les plus classiques puisque, sauf erreur de ma part, ils sont cités dans la circulaire de Mars 1960.

Le foyer de post-cure est un lieu d’hébergement collectif avec une équipe pluridisciplinaire à demeure : médecin, infirmiers, psychologue, assistante sociale…

Indications : en principe, patients hospitalisés en voie de réinsertion sociale et professionnelle, autonomes ou à peu près (une des conditions d’admission est représentée par la possession d’un travail au mieux, au pire par une démarche de réinsertion en cours). L’admission est prononcée par l’équipe soignante après entretien avec les référents soignants et avec le patient.

La durée de séjour est théoriquement limitée : 6 mois dans notre cas, éventuellement renouvelables. Ce principe est actuellement très théorique car les conditions du marché du travail aujourd’hui représentent un obstacle à la réinsertion, de même que la précarité de bon nombre de patients. De ce fait, les séjours sont souvent très longs.

Le règlement intérieur prévoit qu’en principe les patients sont absents dans la journée soit parce qu’ils travaillent, soit parce qu’ils effectuent des démarches, ainsi qu’une partie du week-end.

Le suivi est assuré :

 

C. APPARTEMENTS ET MAISONS THERAPEUTIQUES.

Ce sont des unités de vie de 4 à 5 places, banalisées, accueillant des patients semi-autonomes, le plus souvent psychotiques. Ils obligent réglementairement à une présence soignante permanente, y compris la nuit, du moins en ce qui concerne les appartements thérapeutiques stricto sensu (ce n’est pas le cas de nos maisons thérapeutiques), ce qui en fait des structures lourdes : un appartement de 4 places mobilise une équipe de 8 infirmiers à temps plein, car il s’agit d’un substitut à l’hospitalisation. Le but recherché est une autonomisation des patients leur permettant, à plus à plus ou moins long terme, d’intégrer une structure plus « légère ». La visée est à la fois thérapeutique et rééducative. Inconvénient : le paiement du forfait hospitalier représente un obstacle majeur à la réinsertion en tant que privant les malades de la plus grande part de leurs ressources. On peut noter, pour la petite histoire, que son maintien résulte d’un oubli : Monsieur BAUDURET, quand il a rédigé le texte définissant les appartements thérapeutiques a simplement omis, pressé par le temps, ce « détail » et il était trop tard quand on lui en a fait prendre conscience…

Les maisons thérapeutiques peuvent ou non correspondre au même schéma que les appartements (cf. l’intervention de Joëlle PERNET à propos de la maison thérapeutique de CORBEIL).

II LES LIEUX DE VIE

A. LES FOYERS OCCUPATIONNELS

Cités ici pour mémoire, ils reçoivent des sujets en règle déficients intellectuels.

B. LES « PETITES MAISONS ».

Elles existent dans les 8ème et 2ème secteurs de l’Essonne.

Ce sont des lieux de vie recevant des patients généralement psychotiques ou autistes, très régressés. Situées dans des pavillons, les « maisons » sont tenues par une famille d’accueil salariée bénéficiant d’un temps libre dans la journée, car les patients y sont pris en charge ailleurs (CATTP ou hôpital de jour).

Le financement est assuré par le Conseil Général. Ces structures visent à assurer aux malades des conditions de vie « normales » en les sortant de la chronicité hospitalière. Ils payent un loyer et ont droit à l’APL. En fait, on peut les considérer comme des P.F.S. collectifs démédicalisés.

L’équipe de secteur intervient en tant que prestataire de service. Inconvénient : c’est très lourd pour les familles d’accueil qui ne tiennent pas toujours le coup et sont assez malaisées à recruter.

C. L’HEBERGEMENT TEMPORAIRE

(5ème secteur de l’Essonne).

Cette structure, en projet, devrait s’ouvrir d’ici un an. Il s’agit de chambres ou de studios alloués à des patients autonomes sortant de l’hôpital et sans domicile, pour une durée limitée (3 à 6 mois). Ils payent un loyer.

Le but est de fournir un milieu intermédiaire permettant au sujet d’accéder dans un deuxième temps à un mode d’existence socialement banal.

 

D. LES APPARTEMENT ASSOCIATIFS

Les lieux de vie collectifs voire individuels (studio par exemple), ils hébergent des patients sortant de l’hôpital mais dont les ressources sont insuffisantes pour qu’ils puissent, seuls, louer un appartement. Alors que la mise en commun, ajoutée à l’A.P.L., leur permet de vivre à peu près décemment. Il s’agit presque toujours d’appartements H.L.M. Ils sont locataires en titre mais une association assure le cautionnement financier (dans l’Essonne, pour notre établissement, l’A.E.E.R – Association Essonnienne d’Entraide et de Réadaptation – subventionnée par l’E.P.S.).

Indications : en principe, patients autonomes ou à peu près. Dans les faits, il s’agit souvent de psychotiques ayant un très long passé hospitalier, désocialisés, d’où la nécessité d’un accompagnement infirmier assez serré au début, l’objectif visé étant à terme l’autonomisation totale et, dans l’idéal, l’autogestion des appartements.

E. LES FOYERS ALVE-UNAFAM

Ils sont nés d’un constat : l’absence, entre les structures de soins classiques (foyers de post-cure, appartements thérapeutiques) et les appartements associatifs, d’institutions susceptibles d’héberger des personnes sortant de l’hôpital psychiatrique mais pas assez autonomes pour assumer seules la gestion de leur vie quotidienne en appartement associatif. Consciente de ce manque l’ALVE (Association de Lieux de Vie Essonniens) a conçu en 1996 un projet de structures d’accueil et d’hébergement à temps complet en vue de restaurer la vie sociale et une certaine autonomie de personnes souffrant ou ayant souffert de troubles psychiques.

Le 1er foyer a été ouvert à Juvisy/Orge en 2001 ; deux autres sont en projet, à Etampes et Brétigny/Orge.

Indication : personnes orientées par la COTOREP

Dans la pratique, les patients sont choisis et désignés par les secteurs et la COTOREP intervient par la prise de 2 décisions :

Les Foyers ont une vocation intersectorielle (celui de Juvisy recrute sur 3 secteurs, les prochains en couvriront deux). Montés en coopération avec l’UNAFAM, ils ont le statut associatif d’un Foyer Occupationnel pour psychotiques. Le financement est entièrement assuré par le Département qui a fixé un prix de journée (986,55F./résident)

Le Foyer de Juvisy accueille 14 résidents permanents, les prochains compteront 16 places. En outre 4 places d’accueil temporaire sont prévues, réservées en principe aux patients dont les familles appartenant à l’UNAFAM, ont besoin de souffler (vacances, break, etc…)Les équipes de secteur sont des prestataires de service assurant les soins.

Personnel : 1 directeur, soignant psychiatrique, 1 mi-temps de secrétariat, 3 animateurs socio-éducatifs, un infirmier(e) psychiatrique, 3 agents de service, 2 personnes travaillant en alternance pour les permanences de nuit.

A noter : il s’agit d’un dispositif expérimental dont il n’existe pas d’autres exemples, admis par le Ministère et inscrit au SROSS après de (très) longues négociations.

F. LES APPARTEMENTS COMMUMNAUTAIRES

(4ème secteur de l’Essonne).

Nés du constat de l’inadaptation de certains patients psychotiques aux appartements associatifs stricto sensu, ils représentent un moyen terme entre ces derniers et l’appartement thérapeutique : dans un premier temps, nous les avions baptisés « appartements associatifs renforcés », signifiant par là que l’accompagnement des locataires y est plus intense qu’en appartement associatif mais moins qu’en appartement thérapeutique (pas de soignants permanents en place) ;

En pratique :

Les résultats sont intéressants, en particulier celui-ci : en 2000, contrairement aux années précédentes, nous n’avons pas eu à réhospitaliser de patients pendant la période des vacances, habituellement moment de « vacuité » en terme de temps soignant.

Inconvénients : c’est très dévoreur de temps soignant et ça n’entre dans aucune des grilles consacrées, ce qui fait que cette activité n’est pas reconnue.

Au total, il existe un éventail intéressant de possibilités diverses, sachant que :

Néanmoins, il est probablement possible d’imaginer une sorte de « trajectoire idéale » du malade le menant, à partir de l’hôpital, du PFS à l’appartement associatif ou au foyer ALVE-UNAFAM, via l’appartement thérapeutique, le Foyer de post-cure, l’appartement communautaire ou la «  petite maison » l’hébergement temporaire… Mais il ne s’agit là que d’une virtualité…


Dr. Robert BERTHELIER
E.P.S.B.D. ETAMPES

Mise à jour le Vendredi, 28 Mai 2010 09:23