La place des personnes agées dans la prise en charge psychiatrique

Mercredi, 01 Mai 2002 01:00 Yann TARDIVEL
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JUIN 2002 Ile de Berder (56)
« Bro Brezhonneg »

Psychiatrie et personnes âgées

Les problèmes relevant du champ de la psychiatrie infiltrent toute la pathologie observée chez le sujet âgé. Si on prend en compte tout ce qui appartient au domaine de la psychologie médicale (relation médecin-malade, réactions des familles, poids du milieu environnant tant dans le déterminisme de certaines maladies et de leur évolution que dans celui de l’efficacité des traitements), on peut dire que la gériatrie résulte de l’union de deux spécialités médicales, la médecine interne et la psychiatrie. Le psychiatre a, pour des raisons diverses et souvent inconnues, délaissé ce type de malades. A-t-il le droit de continuer à se désintéresser de ces patients et de renforcer par là leur exclusion déjà importante ? Peut-il sans vergogne refuser de mettre à leur disposition les outils qui sont les siens pour calmer l’inquiétude et réduire la souffrance ? Cette question éthique qui se pose à nous doit nous faire réfléchir car elle est indissociablement liée à l’idée que nous nous faisons de l’homme et aux valeurs humanistes que nous défendons.

Parmi les personnes âgées relevant de la psychiatrie, on peut distinguer trois catégories :

  1. La première catégorie constitue une population que les moyens thérapeutiques modernes permettent de ne pas renouveler, et représente donc un reliquat du passé en voie d’extinction.
  2. La deuxième catégorie constitue une population classique en psychiatrie qui ne se distingue théoriquement des autres malades hospitalisés que par l’âge. Elle est prise en charge par les équipes soignantes du secteur de psychiatrie générale soit à son domicile, soit dans les structures intra et extra-hospitalières.
  3. La troisième catégorie constitue une population par définition chronique dans l’état actuel de nos connaissances scientifiques, pour laquelle un plan de prise en charge spécifique au long cours s’impose.

Cette prise en charge est basée sur un principe fondamental qui est de miser sur une réversibilité des troubles quels qu’ils soient. Sinon, il faudrait se résigner à faire de la défectologie.

Si la notion de démence véhicule les notions d’incurabilité et d’irréversibilité, il est important aujourd’hui d’en revoir les définitions et pour deux raisons :

  1. il existe une psychologie « normale » du vieillissement amenant à une diminution des facultés intellectuelles et à la mise en place de systèmes défensifs induisant l’inhibition.
  2. Les personnes détériorées ne véhiculent pas toujours les deux notions précédemment citées (la clinique nous le prouvant tous les jours).

Il nous appartient donc de mettre en place des lieux de soins spécifiques, où la psychiatrie revendiquera sa place (en terme de mots, concepts, processus, sens..) ;) en réciprocité avec des lieux de vie où nos patients pourront vieillir dignement.

Soigner la démence pourra se faire à différents stades :

La pratique nous montre les difficultés à travailler seul, nous devons donc nous inclure dans le système général existant tout en conservant notre spécificité.

Géronto-psychiatrie et géronto-psychiatrie de liaison

La géronto-psychiatrie désigne la psychiatrie du sujet âgé et nous préférons réserver le terme psychogériatrie à la psychologie médicale psychiatrique, c’est-à-dire, à l’approche psychodynamique du patient et à l’analyse de la relation soignante en milieu gériatrique.

Adoptant le modèle de la pluridisciplinarité, l’identité de la géronto-psychiatrie se fond sur ce que les maladies mentales tardives apportent à notre connaissance de l’homme et de son vieillissement en affirmant sa référence à la politique et aux valeurs de la psychiatrie de secteur.

Cette adhésion implique :

Les soins géronto-psychiatriques ont deux caractéristiques essentielles et spécifiques :

Les missions de la géronto-psychiatrie seraient donc :

La géronto-psychiatrie de liaison peut s’articuler entre :

* consultation spécialisée

cet ensemble s’organisant au sein d’une fédération des moyens des secteurs de psychiatrie adulte, dans le cadre de l’intersectorialité, et des moyens des institutions pour personnes âgées (E.H.P.A.D. et S.S.R.), cette fédération s’articulant autour d’un Conseil de Fédération impliquant psychiatres, gériatres, médecins coordinateurs, médécins généralistes, infirmiers de secteur et de soins généraux, psychologues, kinésithérapeutes … (cf. schéma d’articulation).

Inter secteur ou département de géronto-psychiatrie

Pour assurer l’impérative liaison entre les secteurs de psychiatrie générale et les équipes du service de géronto-psychiatrie, deux possibilités s’offrent à nous :

Disons de suite, que la création d’intersecteur de psycho-gériatrie constitue un cadre directif et stimulant, mais difficile dans les conditions économiques actuelles à étendre à l’ensemble du pays.

De toutes les dispositions offertes par la loi, c’est l’organisation de l’intersectorialité en fédération qui nous semble le mieux préserver la richesse de la psychiatrie publique. La souplesse de la fédération, la nécessaire rédaction d’un règlement intérieur, la concertation qu’elle suscite, sa réversibilité, son inscription complémentaire au sein des secteurs sont autant d’éléments dynamiques dont il ne faudra pas négliger le risque conflictuel et parfois fragilisant.

La création de département de géronto-psychiatrie présente beaucoup plus de progressivité et de souplesse.

Le texte précise :

« Avec l’accord des chefs de service intéressés, il peut être constitué des départements regroupant deux ou plusieurs services, en tout ou en partie, soit en vue du rapprochement d’activités médicales complémentaires, soit en vue d’un regroupement de moyens en personnels, soit en vue d’une gestion commune de lits ou d’équipements, soit pour la réalisation de plusieurs de ces objectifs.

La délibération du Conseil d’Administration créant un département est prise après avis de la commission médicale d’établissement.

Les activités du département sont placées sous la responsabilité d’un coordinateur.

L’organisation et le fonctionnement du département sont définis par un règlement intérieur, élaboré par les médecins titulaires et par les cadres para-médicaux. Il est arrêté par le Conseil d’Administration après avis de la C.M.E. Il précise … les modalités d’association des différents médecins, le rôle du coordonnateur et de ses assistants, les modalités d’association du personnel soignant et médico-technique aux activités du département ».

Ceci permet donc :

a) la création de structures géronto-psychiatriques en tenant compte des importantes disparités constatées entre les actuels secteurs de psychiatrie générale :

b) La création progressive d’un dispositif de soins aux personnes âgées (cf SROSS)

c) La sauvegarde de l’esprit de la politique de secteur par la nécessaire coordination établie dans le cadre du règlement intérieur entre les médecins et les soignants des secteurs de psychiatrie générale et ceux du département de géronto-psychiatrie, y compris les services de soins à domicile.

Progressivité de la mise en place, planification des moyens, échéancier des mises en œuvre, en vue de satisfaire l’urgence et l’importance des besoins, telle est la finalité de la démarche.

Mise à jour le Vendredi, 28 Mai 2010 09:38