Psychiatrie de Secteur à l'Hôpital Général

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FAIRE FACE A LA PANDEMIE

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Cycle de formation 2022, du 29 mai au 3 juin 2022 - MONTAGNAC (34530)

Thème préparé par: Dr Boyer Jean-Paul,  Sandra Calibre, psychologue EMPSA, Ariane Massy et le Dr Navid VATANI

Notes de l'atelier rédigées par :


LE RECOURS A LA TÉLÉCONSULTATION AU SEIN DE


L’ÉQUIPE MOBILE DE PSYCHIATRIE DU SUJET AGÉ


CHI BONNET FREJUS SAINT-RAPHAEL (83 600)



En septembre 2018 l’EMPSA répond à un appel à projet de l’ARS PACA dont il est important de rappeler le contexte.
« La télémédecine constitue une réponse aux difficultés que rencontrent certains patients pour accéder aux soins et contribue à rompre l’isolement dont sont parfois victimes les professionnels de santé.
Elle est source d’innovations notamment organisationnelles pour notre système de santé. Elle peut, par ailleurs, contribuer à l’amélioration du parcours de soins coordonné du patient.
[…] Depuis plusieurs années et dans le prolongement de l’impulsion nationale, l’agence régionale de santé s’engage fortement dans l’accompagnement des projets de télémédecine. »
Le CHI de Fréjus st Raphaël impulse la téléconsultation au travers du projet PSYTEMEDEVE. L’EMPSA s’appuie sur cette dynamique avec des téléconsultations à domicile, dans le cabinet du médecin généraliste et en EHPAD. Ce projet innove de par sa capacité à réduire la distance entre le lieu de vie de la personne et le psychiatre. Egalement de faire face à la pénurie de psychiatre en ville et en CMP.


Avant la toute première téléconsultation :
L’EMPSA intervient sur tout le territoire Var Est, zone rurale et zone urbaine, il nous a fallu dégager du temps pour mener une enquête de terrain, quelles zones sont inadaptées, pas de réseau 4G, et développer des outils pour évaluer cette nouvelle activité.
Sur le plan de la logistique, avec surprise nous avons très rapidement été équipé, soit une tablette Apple par agent (9 tablettes) par contre la mise en route du logiciel permettant de répondre aux normes sécurité, confidentialité etc. a pris beaucoup plus de temps.
Nous avons dû également penser des supports papier pour mener à bien cette activité (demande de consentement, recueil téléconsultation pour éligibilité, etc.) et enfin comment côter l’activité dans le logiciel du CHI et retranscrire dans le dossier patient.



Nous proposons trois formes d’interventions possibles :
Au domicile : un soignant est présent avec le patient  appel au psychiatre en visio.
Au cabinet d’un médecin ou partenaire médico-social : un soignant est présent avec le professionnel  appel au psychiatre visio (obligation d’utiliser le logiciel TEAMS du CHI)
Entre médecins (non réalisable en visio pour le moment).
Concrètement, un infirmier ou moi-même, psychologue, introduit cette modalité d’entretien avec le patient lors de la première ou deuxième rencontre.
Il s’agit de faire face à un public âgé, de prendre en compte la modernité de l’utilisation de ce support. Nous étions rempli d’apriori en 2018, aujourd’hui force de constater que c’est « normal » même courant d’avoir recours à la téléconsultation.
Au niveau de la terminologie il est important de faire la distinction suivante :
La téléconsultation, telle que nous la pratiquons ce jour, passe nécessairement par de la vidéo, il ne s’agit pas d’entretien téléphonique tels que le pratique de nombreux professionnels de santé aujourd’hui. La téléconsultation à l’EMPSA est systématiquement médiatisée par la présence du soignant.
Dès l’année 2019 jusqu’à cette heure, nous nous efforcerons de tester cet outil, cet étrange façon de faire, de communiquer, d’établir une relation à trois médiatisée par une tablette !

Discussion/ vignette clinique/ questions de la salle
Pour illustrer nos propos et aller plus loin dans la réflexion nous vous exposerons des vignettes cliniques qui montrent l’utilisation intéressante de ce support mais également l’impossibilité ou l’usage inadapté dans certains cas.
Vignette Mme Roq  « changement de ton, changement de discours face au psychiatre ». Agée de 82ans madame vit seule toujours dans une plainte de multiple de douleurs, apathique, ne veut pas sortir de chez elle, lors de la 1ere visite à domicile le doc l’avait encouragé à changer de lieu de vie, après plusieurs VAD sans le médecin on découvre une automédication anarchique, on propose la visio et madame change totalement de posture comme si « enfin » elle avait un médecin qui l’écoute elle note les médicaments, pose des questions sort de son habituel discours de plainte. Elle se comportera différemment une fois l’écran éteint !  
Vignette Mme Vide  une PMD face à l’écran : renforcement des idées paranoïaques.
Vignette Mr Fréjus  besoin de réconfort, recherche de validation dans le traitement.
La téléconsultation permet de maintenir un lien entre le psychiatre et le patient, présence rassurante dans le suivi pour le patient.
Vignette Mme Yo  Agée de 72ans, madame vit seule, son mari décède durant notre prise en charge, ainsi que son fils unique. Madame souffre d’une PMD sans suivi psychiatrique, besoin d’être rassurer dans le lien avec le corps médical, rompre la solitude, l’isolement, revalorisation narcissique (se recoiffe, souriante devant la vidéo). L’outil nous permet de maintenir une vigilance auprès de madame.
Le soignant comme témoin, comme béquille pouvant soutenir la parole du sujet. Dédramatisé la consultation avec un psychiatre.
Les limites constatées :
Pas de retour d’expérience avec les professionnels libéraux ou les médecins co, etc.
Une pratique encore limitée à une seule partie du territoire.   
La visite à domicile nécessite davantage de temps pour le soignant.


Dr Boyer Jean-Paul et Sandra Calibre, psychologue EMPSA.

 



 


CHRONIQUES ORDINAIRES DES ANNEES COVID

Chapitre 2



1 / Les années commencent toujours en Juin.

Juin 2021. Une impression de « normalité » revenue. Je peux participer aux journées de psychiatrie de secteur à l’Hôpital Général qui se déroulent à Collonges la Rouge. Mes premières participations datent des années 1980 et l’année dernière COVID oblige, nous avions dû annuler. On se retrouve enfin dans la chaude ambiance des participants nouveaux et anciens, dans le plaisir des échanges … et des spécialités locales.

Et, cerise sur le gâteau, je pars en vacances en Grèce, utilisation du Pass Sanitaire à 2 vaccins (je vais enfin pouvoir me servir des QR codes), + 1 test PCR (je m’y étais essayé quelques fois quand ils l’avaient rendu obligatoire pour accéder aux EHPADS au Printemps, « gratouillis » dans le nez)

Angoisse pour le voyage : bordereau à remplir envoyé par l’ambassade de Grèce et récupéré dans les mails rejetés !

Mais, cet été, a été « comme avant »



2 / Maintenant revenons sur ce que furent les premiers mois de 2021.

Il faut vacciner les personnes agées. Quand les vaccins se compliquent.

Donc nous avons les vaccins à ARN que l’on découvre, qui au début, comme c’est nouveau, inquiètent, c’est le MODERNA, et le PFIZZER qui va bientôt devenir « la Rolls » des vaccins et le JOHNSON, classique, produit du brexit anglais. Apres quelques effets secondaire du JOHNSON celui-ci va être rapidement rejeté, bien que largement utilisé en Angleterre. Comme la vaccination a du mal à se mettre en place et qu’il y a peu de vaccin au début, les gens se voient proposer du JOHNSON qu’ils refusent ; on le réserve alors plutôt pour les plus jeunes mais il apparait que c’est eux qui font le plus d’effets secondaires. Situation bien « à la Française », et finalement l’infirmier de l’équipe à qui on avait imposé du JOHNSON doit être repiqué quelques semaines après avec du MODERNA.

Et bien sûr il apparait rapidement que les stocks de vaccins n’existent pas d’où de longues files d’attente et le retour de la question vaccinodromes ou pas et la « petite musique » libérale.

Intéressant quand même de voir que cela s’est équilibré après.

Puis, divine surprise, au fur et à mesure que l’on est en état de répondre à la demande vaccinale, c’est les « antivaccins » (et les anti-pass) qui apparaissent (quelque chose rappelant une dérive « sectaire » constitué d’emblée avec ce qui parait être une dose de violence)

La vaccination va finir par être imposée aux soignants et le Pass vaccin va devenir Pass Sanitaire et contrôlera les entrées dans les lieux publics.


3 / Mais en ce début d’année 2021 on va accéder à la notion des variants.

On était parti sur du COVID et rapidement il va falloir tenir compte de la notion de mutation, de variants. En Angleterre la flambée du COVID est due à une variante de l’alpha qui après se répand en Europe. Chaque fois l’inquiétude va monter car l’on se demande si les vaccins sont efficaces sur ces variants ;

On commence à s’habituer au variant anglais, mais apparait le gamma qui semble pour le coup plus dangereux en même temps qu’il y a un delta indien.

Sur le plan de la pandémie en mars 2021 c’est la 3eme vague qui atteint plutôt les jeunes, les plus vieux étant vaccinés à 70%

Déconfinement en mai 2021

Le Pass sanitaire est mis en place le 9 juin 2021

La 3eme vague vient mourir avec le déconfinement de l’été qui nous conduit à la 4éme vague des ados et des jeunes adultes et c’est la progression de la vaccination qui va stopper la chose.

Entre temps est apparu le variant beta sud-africain (en fait décrit par les sud-africains qui du coup n’apprécient pas qu’on utilise leur nom pour cela alors qu’ils ont fait l’effort de renseigner les sociétés savantes. On l’imagine issue d’une souche ancienne qui aurait été croisée avec des immunodéprimés… angoisses ! mais non finalement les vaccins sortent toujours vainqueurs.

Petite musique sur les vaccins et les rappels et finalement le Pass Sanitaire passe à 3 doses de vaccin à partir de septembre 2021

Dans tout cela la médecine ne s’est pas laissé distancer. Les thérapeutiques se sont améliorées, l’utilisation de l’O2, les anti-inflammatoires, des produits spécifiques vont apparaitre.

SANOFI doit même nous « sortir » un vaccin traditionnel.

L’importance de l’orage anti-inflammatoire du début va être mis en évidence pouvant rendre inadaptée nos réponses corporelles

A l’hôpital les équipes se sont usées aux rythmes des vagues et des relâchements des déconfinements

Elles souffrent et craquent de l’exceptionnel qui devient quotidien, elles payent les dettes du passé.

Ségur de la santé, augmentations, ou pas, heures sup, primes médicales.

La psychologie, la psychiatrie est de plus en plus mise en avant. Comment penser l’impensable ? notre civilisation terrassée par une pandémie, pas mieux que ceux de 14/19 avec la grippe dite Espagnole, et l’on achète l’ouvrage « La grande Tueuse ».

Les COVID longs hantent les esprits.

Pour notre service il est toujours fermé et comme j’en fais la remarque au collègue chef de Pôle il me répond qu’au moins la psychiatrie n’a pas été un Cluster dans ces mois. Je dois reconnaitre qu’il avait raison.


3 / Décembre 2021 OMICRON

Moins grave mais redoutable contaminant ce variant est à l’origine de la 5ème vague en décembre 2021 ; il fait 500 000 cas par jour et les tests de contrôle se multiplient pour les fêtes.

En même temps il parait moins grave et va contribuer à l’obtention d’une immunité de la population

ET l’EMPSA continue son chemin

Rappel : la mission principale de l’EMPSA est d’apporter une prise en compte de la souffrance psychique et une évaluation psychiatrique au domicile des personnes âgées, avec les particularités liées à l’âge et au contexte environnemental. L’EMPSA participe à l’élaboration du projet de soins, et aide à la prise en charge des situations complexes au domicile. L’équipe apporte son soutien au maintien à domicile des personnes âgées, et à la préservation de leur autonomie. Les interventions sont déclenchées uniquement sur signalement auprès de plateforme Territoriale d’Appui du Var Est.

L’arrivée d’un nouveau cadre de santé, interlocuteur direct pour les équipes, l’expérience du personnel, fait que les équipes sont mieux rodées et plus performantes, malgré la situation sanitaire.

Les modes de fonctionnement entre la partie Draguignan et la partie Fréjus s’égalisent, même si des spécificités persistent, par exemple les logiciels informatiques ne sont pas les mêmes et les zones blanches téléphoniques persistent dans le haut Var.

Les financements sont devenus pérennes.

La Psychiatrie est impactée début octobre 2021 suite au départ, non remplacé dans un premier temps de son chef de pôle, puis un PH de l’équipe restante est nommé Chef et en fin d’année un nouveau PH est arrivé.

Entre temps il a fallu partager les prises en charge des consultations CMP entre les médecins de l’EMPSA et ceux de la psychiatrie adulte.

Pour ma part j’ai continué le travail de consultations au sein des unités du Centre de Gérontologie du CHI ½ journée par semaine.

Le 7 janvier 2022 la 1ère chef de service de L’EMPSA part à la retraite et le Dr Vatani reprend la chefferie et devient responsable pour les unités de Fréjus et de Draguignan.

Les réunions se font en téléconsultation.

Pour moi j’ai choisi de poursuivre encore quelques temps mon accompagnement et j’ai signé avec l’hôpital le 17 novembre 2021 un « Contrat d’Accueil d’un Collaborateur Occasionnel » ou contrat de bénévolat qui me permet d’assurer une supervision de réunion sur l’EMPSA (on notera que s’il n’y a pas de planning horaire prévu il est bien précisé que ce contrat n’ouvre pas droit à rémunération).

A la sortie du 1er confinement, et dans le cadre de l’urgence sanitaire les procédures ont été maintenues pour garantir une sécurité des VAD soit, un contact téléphonique préalable avec informations exhaustives auprès du patient et de son entourage, une information sur les gestes barrières, des équipements de protections individuelles, un questionnaire de vaccination.

Dans ce contexte le télétravail n’a pas été réactivé.

Le projet de téléconsultation s’est mis en place en 2020 et c’est poursuivi en 2021.Le patient doit être vu une première fois par le médecin. Pour les entretiens suivants en téléconsultation il faut recueillir le consentement du patient, l’IDE se rend à domicile et prépare la consultation avec utilisation d’une tablette et d’un téléphone en sus si besoin, puis l’entretien se fait avec le médecin qui est à son bureau, l’IDE termine enfin l’entretien avec le patient.

En 2021, 31 téléconsultations ont été réalisées ainsi.

L’équipe a participé à un travail sur le Parcours Patient et préparé la démarche de certification.


4/ En janvier 2022, 1 français sur 10 est testé positif, Omicron sans doute.

C’est dans ce contexte, après un voyage en avion, vacances avec mon épouse, que je me suis retrouvé positif.

Léger mal à la gorge et surpris quand le pharmacien me dit que mon test antigénique est positif. Ce n’est plus l’inquiétude du début, quelques mesures d’isolement par rapport à mon épouse qui, elle, ne sera pas malade. Au bout de trois semaine de tests positifs, le pharmacien me dit de « laisser tomber». Mais comme ça me parait difficile de recevoir en expertise des patients vulnérables, j’attends. Pour 2 patients que je connais déjà, je fais les expertises (protection de biens) par téléphone. Finalement un nouveau test antigénique après encore une semaine va se révéler négatif (soit 4 semaines de positivité)

Je n’ai pas eu beaucoup de symptômes, plutôt fatigué certes, mais beaucoup de rêves, dont un où au réveil le matin je ne sais plus si je rêvais ou si j’étais dans la réalité, ce qui était perturbant car c’était un rêve où il y avait un « homicide ». Je n’avais jamais vécu cela et il m’a fallu une dizaine de minutes pour me retrouver dans un état de conscience normal. Cela m’a évoqué les hallucinations des personnes sous morphinique qui plusieurs mois après croit plus à la réalité de leurs hallucinations qu’à leur vécu réel. J’ai repensé alors aux effets neurologiques du COVID. Sur internet, dans les groupes d’échanges, ces phénomènes sont souvent évoqués. A voir si des hypothèses seront soulevées.

Dans les jours qui ont suivi, je me suis surpris à resaler systématiquement mes aliments jusqu’à ce que je m’aperçoive que j’avais perdu le gout du sel, assez spécifiquement. J’ai décidé de ne plus rajouter de sel surtout que les doses commençaient à devenir importantes et les repas pas meilleurs. Je suis même demandé si l’abus de sel ne participait pas à mon vécu de fatigue.

Lundi 16 mai 2022, le masque a cessé d’être obligatoire dans les transports en commun.





Docteur Jean-Paul BOYER Psychiatre

EMPSA – Hôpital de FREJUS SAINT RAPHAEL

Mai 2022

Mise à jour le Mercredi, 14 Juin 2023 20:27  

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